Pourquoi ce nom ? ATANS... Plutôt bizarre.
La dénomination de l'art africain a souvent été l'occasion d'un pugilat entre spécialistes. On peut citer en exemple les discussions passionnées (euphémisme) autour des "arts premiers" et la création du musée du Quai Branly. Avouons-le : même si ce terme est désormais passé dans le langage courant, il n'est guère satisfaisant.
"Premier" indique une ancienneté plus grande qui semble difficilement justifiable. On trouve certes des œuvres anciennes en Afrique : citons par exemple les chefs d’œuvre de la culture Nagada dès le 4ème millénaire avant notre ère (photo). Pourtant, ces dernières sont généralement associées au champ d'étude de la culture égyptienne, malgré une esthétique plus abstraite et cubiste . Or, la plupart du temps l'art premier africain est (malheureusement) dissocié de l'art égyptien en dépit des écrits de Cheikh Anta Diop (1). A croire que l’Égypte est sur un autre continent...
Autre problème, les œuvres reconnues comme anciennes dans notre domaine sont rarement antérieures au XIXème siècle en dépit d'exceptions notables au Mali par exemple (Tellem, Dogon, Djenné, etc.) mais aussi au Nigeria (2).
Donc le terme "premier" n'a pas vraiment ma préférence même si je l'utilise paresseusement.
Les autres dénomination ne sont guère plus satisfaisantes : art "nègre" (daté et politiquement incorrect), art "tribal" (usage anglo-saxon comme dans la revue éponyme, mais problématique d'un point de vue anthropologique).
En définitive, le nom que je préfère est celui d'Arts Traditionnels d'Afrique Noire (3). On pourra dire que cela n'est pas nouveau : Jean Laude a publié dès 1966 son fameux ouvrage "les arts de l'Afrique noire". Quant à la distinction entre art traditionnel et art contemporain, elle a au moins le mérite d'être universelle. Bien entendu les traditions ne se sont pas arrêtées au milieu du XXème siècle et l'on danse encore dans de nombreux groupes ethniques avec des masques authentiques même si la peinture industrielle a remplacé les pigments d'origine végétale.
Alors pourquoi rajouter "subsaharienne" ? L'afrique noire n'est-elle pas par nature subsaharienne ? certes, certes. Et l'art Touareg ? et les coptes ? Mais voilà : le nom ATAN était déjà pris par une galerie fort éloignée de mes passions : d'où le "S" en plus.
Explication triviale et que nul ne voit un anagramme dans ATANS !
Figure ithyphallique de la culture de Nagada. IVème millénaire AVJC . Musée du Louvre.
(1) Voir par exemple Cheikh Anta Diop : l'antiquité africaine par l'image. IFAN/Université de Dakar. 1976.
(2) Sans parler du subtil distinguo entre l'archéologie africaine (par exemples les oeuvres rupestres du Tassili) et les arts premiers.
(3) j'aime bien aussi arts rituels même si tout ne relève pas du rite au sens strict.